Manette Sakura vs Manette Hokusai "représentant" la rivalité homme / femme
dans le jeu vidéo, réalisé par Draw my Pad
Depuis toujours les jeux vidéo sont fréquentés par un milieu principalement masculin, en effet les stéréotypes veulent que ce soit un marché créé par des hommes pour des hommes. Or si l’on se remémore les années 1970 et la grande époque de l’arcade, les constructeurs ciblaient principalement les jeunes en plaçant leurs machines dans des lieux hyper-fréquentés mais sans pour autant faire une distinction homme / femme. C’est à partir des années 90 que la femme à fait son apparition dans les jeux vidéo mais d’une tout autre manière que les joueuses l’auraient espéré.
Étonnamment les clichés utilisés par les industriels dans la publicité, tous secteurs confondus, se retrouvent dans les jeux vidéo avec l’apparition de la femme objet, utilisées comme instrument du désir. Il suffit de regarder la campagne de publicité effectuée par Sega concernant son jeu Davis Cup World Tour qui met en scène une joueuse de tennis peu habillée. Cette date marque le commencement d’un long périple de stéréotypes stigmatisant pour la femme au sein du jeu vidéo avec des titres tel que Dead or Alive Xtrem Beach Volleyball mettant en avant des femmes quasiment dénudées ou encore la fameuse Lara Croft héroïne du jeu Tomb Raider aux formes provocatrices.
Campagne de publicité mise en place par la marque Sega
lors de la sortie du jeu Davis Cup World Tour
Longtemps sous-estimé au sein du jeu vidéo c’est à partir de 2006 que les éditeurs se sont rendus compte du potentiel que pouvait représenter le segment des femmes. Surfant sur la vague du « manger bouger » la Nintendo Wii insuffle un véritable élan dans le milieu du gaming avec des titres tel que Wii fit plus ou Fit Music Wii, qui paradoxalement joue toujours sur le physique, mais aussi avec des jeux de réflexion qui semblent mieux convenir à un public féminin. Mais la vraie révolution se fait à partir des années 2010 avec l’arrivée des social gamings grâce aux réseaux sociaux et jeux pour smartphone.
En 1999 on estimait le nombre de joueuses à 20% en France, 15 ans plus tard elles sont 50%, respectant ainsi la parité homme / femme. Selon une étude réalisée par l’éditeur de jeu « Royal Cactus » 69% des joueurs de social gaming sont en réalité des femmes mais alors la majorité des joueuses seraient elles en train de s’enfermer dans un autre cliché à leur insu, celui des casual gamer ? Absolument pas, en effet l’étude réalisée par « Royal Cactus » met en exergue le fait que lorsqu’une femme entame une partie, « elle joue trois minutes de plus que l’homme à chaque session, elle le dépasse de 10 niveaux en moyenne et se connecte environ 8,7 fois par mois contre 6,9 pour l’homme » les rendant ainsi plus endurantes et compétitives que les hommes.
Répartition des joueurs et joueuses hommes / femmes
en 2015 (Source SELL)
Certes le marché du jeu vidéo féminin évolue mais les stéréotypes et préjugés sont toujours largement présents dans les jeux pour consoles de salon destinés au grand public. The last guardian, Doom, Fallout 4… sont quelques-uns des jeux les plus attendus de l’année 2015, présentés lors de l’E3 en mai de cette même année la constatation est là, aucun d’eux ne propose d’incarner un personnage féminin. L’un des seuls studios qui se démarque de la tendance reste Square Enix avec son héroïne Lara Croft.
Mais alors pourquoi ne pas proposer la possibilité d’incarner un personnage féminin comme l’a fait NHL 2012 afin de mieux répondre aux attentes des joueuses ? Selon Kayane, joueuse professionnelle française spécialisée dans le jeu de combat, désormais chroniqueuse pour le journal Game One l’explication de telles différences serait à trouver « du côté du marketing des éditeurs qui ne veulent surtout pas bousculer les habitudes culturelles ».
Manette personnalisée Little India inspirant au voyage avec un style volontairement épuré
pouvant correspondre à un public plus féminin. Réalisé par Draw my Pad
Reflet de notre société dans de nombreux domaines le jeu vidéo n’exclue pas la non parité des femmes face aux hommes. De plus en tentant de cibler principalement les femmes en tant que joueurs sur smartphone les industriels créent une autre disparité, celle des « casu » (casual gamer) qui serait surtout fréquenté par un public féminin qui vont à l’encontre des « gamers » principalement masculin.
Or avec l’avènement des consoles de salon à partir des années 1990 et des ordinateurs dans les années 2000, autant les hommes que les femmes évoluent dans cette banalisation du jeu vidéo, et le public féminin est de plus en plus enclin à adhérer à ses pratiques dîtes masculines, pour preuve FIFA 16 (jeu de football) vient d’introduire les sélections féminines au sein de son jeu.
Révolution dans le monde de Fifa avec l’apparition des premières équipes féminines
lors de la sortie du jeu vidéo Fifa 16
Dans un monde où le progaming est de plus en plus important il serait intéressant d’intégrer plus de femmes au sein des équipes de professionnelles en imposant aux sponsors une équipe female dans chacun des jeux. Largement diffusé sur internet, ce système pourrait être le moyen de faire prendre conscience aux industriels que le gaming au féminin sera à prendre en compte à l’avenir, de plus cela pourrait attirer plus de femmes dans le milieu afin d’être reconnue aux yeux de tous. D’ailleurs lorsque l’on sait que les équipes d’éditeurs sont composés majoritairement d’hommeson pourrait s’interroger sur leur efficacité à comprendre les désirs des joueuses. Créer des pôles de recherches composés de plus de femmes au sein des maisons d’édition à l’image de l’association Women in Games, travailler avec les écoles ou encore axer sa communication de manière plus neutre pourraient être des solutions à envisager.
Et vous mesdames, joueuses et gameuzes qui êtes les premières concernées quel est votre avis sur la question ?
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Réflexion rédigée par Romain LELONG, dirigeant de la société Draw my Pad, extrait du mémoire "Comment les entreprises évoluant dans le secteur du jeu vidéo ont su modifier leur offre et ainsi s’adapter aux changements de comportements des joueurs dans un milieu fortement concurrencé"
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Liens utiles
Margxt : blogueuse passionnée de jeux video
Women in Games : Association œuvrant pour la mixité dans l’industrie du jeu vidéo en France
Kayane : Joueuse professionnelle et chroniqueuse pour le journal Game One
Draw my Pad : site de personnalisation de manettes officielles PS4 et Xbox One pour les joueurs et les joueuses